Éditeur : LES ARGONAUTES
ISBN numérique PDF: 9782494289017
ISBN numérique ePub: 9782494289000
Parution : 2023
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Été 1936. Janna, dix-huit ans, est envoyée en Allemagne près d'Aix-la-Chapelle. Un ami de son père, Egon von Bötticher, doit l'aider à se perfectionner au fleuret. Grand maître d’escrime, von Bötticher réside dans une belle propriété, le Raeren, où il organise, malgré leur interdiction, des combats de Mensur avec armes réelles. Janna cherche à percer le mystère unissant cet homme avec son père et tombe inévitablement sous le charme de son maître charismatique. Bien plus que l'histoire d'un premier amour délicieusement rendue, La Vierge néerlandaise explore l’initiation de Janna au monde adulte comme une expérience contradictoire et troublante. Et, ainsi que Janna le formule lorsqu’elle rentre aux Pays-Bas : « Je ne pouvais pas revenir en arrière. C’était un aller sans retour. » Marente de Moor, née en 1972 au Haye, est l’autrice de romans à succès dont La Vierge néerlandaise, traduit dans une quinzaine de langues et récompensé par le prestigieux Prix AKO ainsi que le prix de l’Union Européenne de littérature. Elle a vécu plusieurs années à Saint-Pétersbourg en Russie, où elle a travaillé comme correspondante. Publiée par certains des éditeurs les plus importants au monde, La Vierge néerlandaise est le premier roman de Marente de Moor à être traduit en français. Ce roman d'une beauté intemporel m'a tout de suite paru comme une première publication rêvée et presque évidente pour ma nouvelle maison Les Argonautes. Lors de sa lecture j'ai ressenti le même plaisir que la critique du New York Times, Danielle Trussoni, qui a sa publication américaine en 2019, neuf ans après sa parution aux Pays Bas, a comparé le roman à Jane Eyre et à Rebecca de Daphne du Maurier : "Addictive (...) La situation de Janna est celle de Jane Eyre et de la narratrice de "Rebecca" de du Maurier. Elle est une jeune femme qui tombe amoureuse d'un homme plus âgé, si abîmé qu'il ne peut pas être bon pour elle. Escrime et amour. Bataille et désir. Cette combinaison transforme les tentatives d'amour de Janna en un jeu d'adresse, un jeu qui laisse des traces de sang et des cicatrices, donnant au roman une beauté cruelle. (...) L'un des romans les plus délicieux que j'ai lus depuis longtemps" Danielle Trussoni pour le New York Times Book Review Plein d'atmosphère, courageux, sensible et profond, l’écriture de Marente de Moor crée des univers romanesques singuliers. La puissance de son langage m'a tout de suite séduite, je reste impressionné par la douceur et la malice avec laquelle elle l’applique. Malgré le grand succès de son roman récent Phon, que je vais publier fin 2024, j'ai donc choisi d'introduire cette autrice importante, versatile et lumineuse au public français avec son deuxième roman, La Vierge néerlandaise, un texte qui pour moi a le potentiel de devenir un classique. Pendant l’été 1936, Janna, dix-huit ans, est envoyée en Allemagne près de Aix-la-Chapelle. Un ami de son père, Egon von Bötticher, doit aider la jeune fille néerlandaise à se perfectionner au fleuret. Grand maître d’escrime, von Bötticher réside à la campagne dans une belle propriété, le Raeren, où il organise, malgré leur interdiction, des combats de Mensur avec armes réelles. Janna cherche à percer le mystère unissant cet homme blessé et aigri avec son père et tombe inévitablement sous le charme de son maître charismatique. Liés depuis la Première Guerre mondiale par le code d’honneur, les deux hommes semblent avoir une dette à régler. Von Bötticher, husard de corps mortellement blessé et dérobé de son cheval, a été sauvé par le père de Janna, un médecin néerlandais. En tant qu'interné militaire des camps des Pays Bas neutres, il était empêché de retourner sur le champ de bataille. Mais lorsque à la fin des années trente la barbarie des Nazis commence à envahir l'Allemagne et à menacer l’Europe avec une nouvelle guerre, les notions de courage, d’amitié et d’héroïsme ne semblent plus valoir grand-chose, Janna se demande qui va devoir payer la dette. Bien plus que l’histoire d’un premier amour, délicieusement rendue, La Vierge néerlandaise explore l’initiation de Janna au monde adulte comme une expérience contradictoire et troublante. Avec une mélancolie saisissante, Marente de Moor évoque les tensions d’un monde en proie à un changement majeur. Et, ainsi que Janna le formule lorsqu’elle rentre aux Pays-Bas : « Plus rien ne sera comme avant, ce voyage fut un aller sans retour. » Arlette Ounanian, née en 1943 à Paris, est l’une des traductrices du néerlandais les plus reconnues. Venant du monde du théâtre, elle vit depuis longtemps au Pays Bas, aujourd’hui sur un bateau sur l’un des canaux d’Amsterdam. Elle est notamment lauréate du Prix des Phares du Nord 2019/2020 pour sa traduction de Ton histoire. Mon histoire de Connie Palmen (Actes Sud). « L’intensité de l’univers émotionnel de Janna, l’atmosphère menaçante de l’Allemagne à la veille de la Seconde Guerre mondiale et la richesse imaginative de Marente de Moor font de La Jeune Fille néerlandaise l’un des romans les plus exquis que j’aie lus depuis des années. » The New York Times Book Review « Une intrigue bouleversante, sur le fil du rasoir, entre Ernst Jünger et Léon Tolstoï. Ses métaphores sur la nature sont d’une puissance animale, ses réflexions aussi brillantes qu’originales, et sa description de l’atmosphère oppressante régnant avant la tempête de la Seconde Guerre mondiale témoigne d’un grand art narratif. » Frankfurter Allgemeine Zeitung « Avec sa plume magnifiquement ciselée, l’autrice construit une atmosphère inquiétante et met en scène des personnages en proie à des dilemmes moraux et des passions déchaînées. » NRC Handelsblad Extraits : La Vierge néerlandaise de Marente de Moor 1 On aurait pu dire que von Bötticher était une gueule cassée, mais au bout d’une semaine je ne remarquais plus ses cicatrices. On s’habitue vite aux anomalies physiques. Une personne affreusement mutilée peut être heureuse en amour si elle rencontre quelqu’un qui n’est pas obnubilé par la symétrie. Pourtant, en dépit des exemples que nous offre la nature, la plupart des gens ont la manie de séparer les choses en deux moitiés parfaitement égales. Egon von Bötticher était beau ; sa cicatrice était laide. Une plaie boursouflée, infligée par une arme émoussée dans une main instable. Comme on ne m’avait pas prévenue, la première impression que je lui ai donnée a été celle d’une jeune fille choquée. J’avais dix-huit ans et j’étais habillée trop chaudement en descendant du train après mon premier voyage à l’étranger. Maastricht - Aix-la-Chapelle, un trajet négligeable. Mon père m’avait accompagnée à la gare. Je le vois encore, debout devant la fenêtre du wagon, étonnamment petit et maigre tandis que des colonnes de vapeur s’élevaient derrière lui. Il avait fait un bond quand les deux coups de marteau du visiteur de gare avaient commandé le desserrement des freins. Les wagons rouges sortant des mines roulaient à côté de nous, suivis par des wagons à bestiaux d’où s’échappaient des beuglements et, dans ce boucan, mon père est devenu de plus en plus petit avant de disparaître au tournant. Ne pose pas de questions. Pars, c’est tout. Pendant son monologue, un soir après le dîner, il avait à peine pris le temps de respirer. Il parlait d’un vieil ami, autrefois un très bon ami, toujours un bon maître. Ensuite, soyons honnêtes, nous savions que je devais saisir cette occasion si je voulais réussir dans le sport, je ne voulais quand même pas devenir servante, bon, alors, vois ça comme des vacances, quelques semaines d’escrime dans ce très bel endroit qu’est la Rhénanie. Entre les deux gares, il y avait quarante kilomètres ; entre les deux amis, vingt ans. Sur le quai d’Aix-la-Chapelle, von Bötticher me tournait le dos. Il savait que je viendrais à lui. Il était ce genre d’homme. Et j’ai deviné en effet qu’il ne pouvait être que le géant basané coiffé d’un homburg crème. Pas de costume assorti au chapeau, mais un polo en laine peignée et un de ces pantalons marins avec une large bande à la taille. Très distingué. Et moi, la fille, je débarquais dans une robe chasuble rapiécée. Quand il a tourné vers moi son visage déchiré, j’ai eu un mouvement de recul. La chair fibreuse avait pâli avec les années, mais était encore rose. J’imagine que ma réaction l’a agacé, je n’étais probablement pas la première à me comporter ainsi. Ses yeux se sont portés sur ma poitrine. J’ai saisi mon médaillon pour cacher ce que ma robe permettait à peine de voir. — C’est tout ? Il parlait des bagages. Il avait tâté mon sac d’escrime pour sentir combien d’armes il contenait. Ma valise, c’était à moi de la porter. L’image idyllique que je me faisais de mon maître avant de le rencontrer s’est très vite effondrée. … — On le rencontre sur tous les champs de bataille, le soldat intouchable. En général, on le voit de dos, car il marche devant nous. Il avance calmement, il se tient bien droit alors que les balles lui sifflent aux oreilles. Elles ne le touchent pas, il le sait. Mais, alors qu’on s’étonne, on comprend qu’on n’est pas comme lui. On ne fait pas partie des intouchables. Et c’est à ce moment-là qu’on est touché. … Le lendemain matin, je me suis réveillée en pleine confusion. Je ne m’attendais pas qu’une nuit aussi noire puisse s’achever, que le soleil puisse encore briller dans cette chambre. J’entendais les cloches du village sonner à proximité. C’étaient des sons à présent, des coups appuyés les uns après les autres pour qui pouvait les entendre, et donc aussi pour nous, les extravagants du Raeren. Quand j’ai ouvert la porte du balcon, il s’est avéré qu’il faisait plus chaud dehors qu’à l’intérieur. Le paysage était un brocart finement tissé de feuillages ondulants, mais la vue s’accompagnait d’une odeur de vermoulu et, plus fort que jamais, je sentais la pourriture, les écorces et les mousses du bois de pins, les pommes qu’on avait omis de ramasser, les tas de fumier fumant et la créosote dont Heinz enduisait les portes de l’écurie. Mes amies, même, ne me manquaient pas. Leurs couleurs avaient passé, comme celles d’un magazine maintes fois lu. Je ne pourrais jamais leur raconter ce que j’avais vécu. Je me sentirais seule, je le savais déjà. J’aurais voulu redevenir moi-même, comme avant. C’était cela, la nostalgie, la vraie. Pas quand le voyageur se languit de retrouver son foyer mais quand il languit de se retrouver lui-même, tel qu’il était, avec ce qu’il savait, ce qu’il pensait avant le départ. Je ne voulais plus m’endormir sans que quelqu’un me souhaite bonne nuit, je me sentais plus seule que jamais et, si j’avais une âme-ombre, elle était bien discrète. Peut-être ma vie ne valait-elle pas la peine d’être observée, peut-être que rien de ce que je vivais ne valait la peine d’être transmis. Peut-être le Raeren était-il interdit aux ombres, elles flottaient derrière l’enceinte comme des mendiants que l’espoir d’être accueillis n’aurait pas quittés. … Je ne regretterais pas d’avoir connu cet homme. Il valait la peine qu’on se souvienne de lui ; l’adresse de ses doigts, mais surtout ses lèvres hautaines me reviendraient toujours en mémoire et, aussi, son regard impassible et lointain quand il craquait une allumette parce qu’il savait faire ces choses à l’aveugle, la chaleur et les battements de son cou. Si je partais à cet instant, je pourrais faire de lui ce que je voudrais. Il n’aurait aucune prise sur ce que je raconterais, je pourrais exagérer certaines choses, en taire d’autres, romancer à volonté. Je pourrais en faire un maître d’escrime aimable et un vagabond anarchique fou de moi. Je n’ennuierais personne avec des détails, ce serait un récit compact, bien articulé, qui tiendrait au dos d’une carte postale. Plus limpide, en tout cas, que le chaos de son domaine, son histoire et son avenir, dans lesquels j’allais le laisser inconscient derrière moi. Si nous rentrions à la maison, je ne pourrais plus chanter en toute innocence dans la voiture comme nous avions l’habitude de le faire, et la glace du marchand, juste après la frontière, n’aurait plus le même goût. Si mon père m’en offrait une, ce qu’il ferait, je n’en doutais pas, je serais ridicule dans mon rôle de fille, maladroite et pitoyable, comme l’enfant qui dépasse subitement ses camarades de classe de deux têtes et veut cependant continuer à jouer avec eux. Je ne pouvais pas revenir en arrière. C’était un aller sans retour. Marente de Moor, née en 1972 à La Haye aux Pays-Bas, est l’autrice de quatre romans, un recueil de nouvelles et quelques essais. Elle est la fille de la grande romancière néerlandaise Margriet de Moor. Elle a étudié les langues slaves et la littérature à l’Université d’Amsterdam, où elle obtient son diplôme en 1999. La même année, Marente de Moor publie Petersburgse vertellingen (littéralement « Histoire de Saint-Pétersbourg ») dans l’hebdomadaire néerlandais De Groene Amsterdammer. Elle y raconte ses expériences en Russie, et plus particulièrement à Saint-Pétersbourg, où elle a vécu de 1991 à 2001. Elle fait ses débuts en tant que romancière en 2007 avec De overtreder (littéralement « Le Délinquant »), qui rencontre un franc succès. Sa traduction allemande, Amsterdam und zurück, est aussi très bien reçue. Son deuxième roman, La Vierge néerlandaise propulse Marente de Moor sur le devant de la scène, lui rapportant un des prix littéraires les plus importants des Pays Bas, le prix AKO 2011, ainsi que le prix de littérature de l’Union européenne en 2014. La Vierge néerlandaise est aujourd’hui traduit en seize langues. Roundhay, tuinscène (littéralement « Roundhay, scène de jardin »), son troisième roman inspiré de la vie de Louis le Prince, inventeur français et pionnier du cinéma mystérieusement disparu, a été sélectionné pour le prix Libris en 2014. L’année suivante, Marente de Moor publie son recueil de nouvelles Gezellige verhalen (littéralement « Jolies histoires » ou « Douces histoires »), récompensé par le prix J.M.A. Biesheuvel en 2016. Phon, son dernier roman à ce jour, a été largement salué par la critique lors de sa sortie. Il a reçu les prix F. Bordewijk et Jan Wolkers en 2019, a été nominé pour le prix de littérature BookSpot. Et a été sélectionné meilleur roman de langue néerlandaise pour l’année 2019 par le journal Volkskrant. Marente de Moor vit dans le Limbourg, région frontalière dans le sud-est des Pays-Bas entre la Belgique et l’Allemagne. La Vierge néerlandaise est le premier roman à être traduit en langue française.
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Éditeur : LES ARGONAUTES
ISBN : 9782494289000
Parution : 2023