Éditeur : François Bourin Editions
ISBN numérique ePub: 9791025206072
Parution : 2024
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Quelle est la place des femmes dans la guerre ? Comment envisagent-elles leur engagement selon qu’elles appartiennent à une armée officielle ou à un mouvement révolutionnaire ? Dans quelle mesure les revendications féministes impactent-elles les politiques internationales de défense et de sécurité ? Camille Boutron interroge le fait guerrier et le recours à la violence en évitant une forme d’essentialisme qui voudrait que, par nature, les femmes combattent différemment des hommes. Elle s’appuie notamment sur ses terrains de recherche auprès des ex-révolutionnaires au Pérou, des FARC et des militaires françaises, afin de proposer une analyse inédite du rôle des femmes dans ce qu’elle nomme la « sphère combattante ». Pour ce faire, elle scrute la façon dont le complexe militaro-industriel et le patriarcat s’alimentent mutuellement, perpétuant un système mondial à bout de souffle. Elle remet ainsi radicalement en question notre rapport aux conflits armés et nous invite, en repolitisant l’engagement des femmes pour la paix, à penser une société démilitarisée. Camille Boutron est sociologue. Chercheuse indépendante, elle est régulièrement consultée sur les questions de genre par des organismes comme l’Institut pour la paix, le Haut Conseil à l’Égalité et l’OTAN. Passionnée d’équitation, Camille Boutron est sociologue. Son intérêt pour les femmes combattantes naît d’une rencontre avec une ancienne militante du Sentier lumineux (le Parti communiste péruvien). Ses recherches la mènent ensuite en Colombie, où elle occupe un poste d’enseignante-chercheuse à l’université des Andes à Bogota, puis elle délaisse l’Amérique latine et les guérillas pour la France et ses armées. Elle a grandi à Paris et habite aujourd’hui à Saint-Sauvant, dans la Vienne. Quand on parle des femmes et de la guerre, deux visions opposées émergent : celle, un peu essentialiste, qui présente les femmes comme victimes ou pacificatrices (selon l’idée que les hommes font la guerre que subissent les femmes), et celle qui glorifie des combattantes présentées comme exceptionnelles, reproduisant une vision polarisée de la guerre qui ne prendrait en compte que ceux (et celles) présents sur le champ de bataille. Le discours sur les combattantes est le plus souvent positif, en particulier lorsqu’il s’agit de parler de celles engagées du « bon côté » : les résistantes pendant la Seconde Guerre mondiale, les militaires françaises actuelles ou encore les femmes kurdes luttant contre Daesh. Quant à celles combattant du « mauvais côté », c’est-à-dire au sein d’organisations terroristes et plus généralement pour le compte de l’ennemi, leur engagement est le plus souvent abordé comme l’illustration du dysfonctionnement de leur société d’origine. Aussi intéressantes soient-elles, ces lectures de la participation des femmes contribuent à la dépolitisation du phénomène : tant que les femmes combattantes restent considérées comme des individus exceptionnels, les discours à leur sujet ne remettent pas en cause les assomptions traditionnelles sur la guerre, et donc la guerre elle-même. Depuis une quinzaine d’années, Camille Boutron fait de la recherche de terrain en Amérique du Sud et en France sur l’engagement des femmes dans les conflits armés et organisations militarisées. Elle s’est intéressée en particulier à la façon dont les femmes pouvaient agir et étaient perçues dans des contextes où les valeurs traditionnelles liées au genre se trouvaient bouleversées. La première enquête concerne la participation des femmes au conflit armé ayant déchiré le Pérou dans les années 1980-1990 et cherche à reconstruire les itinéraires de vie de femmes ayant pris les armes au sein des guérillas révolutionnaires. En Colombie, Camille Boutron a plutôt cherché à comprendre quels étaient les rôles des femmes dans le cadre des négociations de paix entre la guérilla des FARC et le gouvernement colombien entre 2012 et 2016. Dans sa troisième enquête, elle s’est intéressée aux armées françaises, au moment où elle intégrait un centre de recherche du ministère des Armées. Sa recherche portait sur la façon dont l’agenda onusien Femmes, paix et sécurité – un vaste programme multilatéral visant à mieux prendre en compte les femmes dans les questions relevant de la sécurité internationale – se voyait investi par les armées françaises. Au-delà des femmes combattantes, ces recherches avaient pour objectif de porter un autre regard sur l’univers guerrier, qu’il s’agisse des luttes révolutionnaires ou des armées professionnelles, en interrogeant chaque fois comment les femmes y étaient perçues et quelle place leur était donnée. Y étaient-elles valorisées ? Ou au contraire devaient-elles faire face à des freins les ramenant sans cesse à leur « condition féminine » ? Une femme peut-elle être cheffe de guerre au même titre qu’un homme ? Quel a pu être l’impact de la montée en puissance des revendications féministes sur les politiques internationales de défense et sécurité ? Dans cet essai, Camille Boutron revisite le fait guerrier en y portant un regard féministe, ce qui suppose de déconstruire en profondeur nos assomptions courantes sur la guerre. Il ne s’agit pas seulement de faire le récit de trajectoires d’exception en montrant que les femmes peuvent elles aussi s’engager sur un champ de bataille, mais plutôt de montrer comment la guerre et le patriarcat s’alimentent mutuellement afin de perpétuer un système mondial à bout de souffle. L’enjeu est bien de proposer une lecture critique de la guerre et du militarisme en tant que dispositifs de domination entre les peuples et les nations. Parler des femmes combattantes, ce n’est donc pas se contenter de prendre le contre-pied d’un récit hégémonique sur la guerre en montrant que « les femmes aussi peuvent combattre », mais remettre radicalement, ontologiquement en question le rapport que nos sociétés entretiennent avec le fait guerrier en tant que pratique sociale et politique. Camille Boutron est sociologue, autrice et cavalière. Ne brillant pas dans sa pratique de l’équitation malgré une passion dévorante, elle se forme en tant qu’historienne puis se dirige vers la sociologie après être tombée follement amoureuse du Pérou lors d’un premier voyage en 2003. Son manque criant de talent manuel ne lui permet pas de vendre des bracelets artisanaux sur les plages, alors elle trouve le moyen d’y retourner en choisissant des études qui requièrent de mener des enquêtes de terrain. Son intérêt pour les femmes combattantes naît d’une rencontre improbable avec une ancienne militante du Sentier lumineux (le Parti communiste péruvien). Ses recherches la mènent ensuite en Colombie, où elle occupe un poste d’enseignante-chercheuse à l’université des Andes à Bogota. Elle opère finalement un virage radical et délaisse l’Amérique latine et les guérillas pour la France et ses armées. Sa réflexion sur les femmes combattantes prend une autre dimension et un tour plus personnel, alors que l’Europe se voit de nouveau touchée par la guerre. Camille Boutron a enseigné dans plusieurs universités, en France et à l’étranger, et publié de nombreux articles académiques, sans jamais vraiment réussir à se conformer aux règles du monde universitaire. Elle assume aujourd’hui une pratique de la sociologie qu’elle se plaît à envisager comme outil d’émancipation accessible au plus grand nombre. Après avoir grandi à Paris et vécu près d’une dizaine d’années entre Lima, Montréal et Bogota, elle a finalement posé ses valises dans le petit village de Saint-Sauvant, dans la Vienne. Et bien qu’elle soit toujours aussi médiocre sur le dos d’un cheval, elle a repris la pratique de l’équitation et tente désespérément de briller sur les terrains de concours complet, où elle n’a pas dit son dernier mot.